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Agroforesterie : adapter l'agriculture face aux changements climatiques

Les changements climatiques auront des effets marquants sur le secteur agricole au Québec dans les prochaines décennies. Les
producteurs et productrices ont tout intérêt à implanter des mesures pour adapter leurs entreprises dès maintenant aux changements
à venir et profiter ainsi des opportunités qui s’offrent à eux, tout en atténuant les impacts négatifs qui devraient survenir. Plusieurs
mesures peuvent être mises en œuvre sur les fermes du Québec pour augmenter leur résilience face aux changements climatiques.
L’agroforesterie constitue une avenue des plus intéressantes à cet égard. Parmi les nombreux avantages qu’elle présente, la
modulation du microclimat fait partie des bénéfices qui peuvent être valorisés sur la ferme pour accroître la capacité adaptative des
entreprises vis-à-vis des changements climatiques.

Le site Agriclimat vous donne accès à des informations plus précises sur l'impact des changements climatiques sur le secteur agricole dans votre région.

 

Aménager des systèmes agroforestiers : une contribution à la résilience face aux changements climatiques

 

Pour les producteurs et productrices du Québec, faire face à ces perturbations constitue un défi majeur. Arriver à maintenir des entreprises stables et florissantes au milieu de tous ces changements ne sera certainement pas une tâche facile et cela peut générer des incertitudes importantes. Ces transformations substantielles de notre système climatique constituent néanmoins une opportunité pour faire le point sur les pratiques actuelles et ouvrir la porte à l’innovation, en adoptant de nouvelles façons de faire mieux adaptées aux réalités des prochaines décennies. En étant proactifs face aux changements à venir, les producteurs et productrices éviteront de simplement subir les contrecoups du climat et chercheront à évoluer avec lui pour développer des entreprises durables et résilientes.

 

De nombreux exemples démontrent que la gestion des risques liés au climat est plus ardue dans des systèmes de cultures peu diversifiés, comme les monocultures ou les cultures en rotations courtes, alors que les systèmes complexes et diversifiés seraient plus résilients face aux perturbations, conférant ainsi plus de stabilité aux productions agricoles40. Or, l’introduction d’arbres dans les systèmes agricoles est une avenue efficace pour augmenter le niveau de complexité et de diversité des agroécosystèmes. Dès lors, l’agroforesterie offre une voie avantageuse pour favoriser l’adaptation du milieu agricole face aux changements climatiques.

Présentation des différents systèmes agroforestiers en contexte québécois

 

L’agroforesterie : bénéfique pour l’agriculture, bénéfique pour les régions

L’agroforesterie génère des bénéfices multiples qui peuvent se manifester depuis l’échelle de la parcelle jusqu’à celle du territoire. Elle permet notamment d’améliorer la santé des sols et la qualité de l’eau, d’accroître la biodiversité et d’augmenter l’attractivité des territoires ruraux2.

L’agroforesterie aide à l’adaptation face aux changements climatiques par ses effets multiples.

 

Les pratiques agroforestières présentent aussi de nombreux avantages face
au phénomène des changements climatiques. Par divers mécanismes
(stockage du carbone dans les parties ligneuses de l’arbre, augmentation du
taux de matière organique dans les sols, etc.), l’agroforesterie augmente
notamment la capacité de séquestration du carbone des agroécosystèmes et
contribue de ce fait à l’atténuation des changements climatiques. Le Groupe
d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) considère
d’ailleurs que, de toutes les pratiques agricoles alternatives, c’est
l’agroforesterie qui présenterait le meilleur potentiel d’atténuation des
changements climatiques28.

 

Dans de nombreux cas, le recours à l’agroforesterie permet également
d’augmenter la capacité d’adaptation des entreprises agricoles face aux
changements climatiques
. Les systèmes agroforestiers peuvent notamment
minimiser les effets négatifs des événements climatiques extrêmes et apporter
une plus grande stabilité sur la ferme au travers de la diversification des
produits et des sources de revenus30. La modification du microclimat entraînée
par la mise en place de systèmes agroforestiers est un élément majeur qui
pourrait être mis à profit pour favoriser une meilleure adaptation face aux
changements climatiques.

Haies brise-vent implantées avec succès sur une ferme laitière biologique dans la région de La Pocatière. Ce système améliore la qualité de vie et le paysage.

 

Crédit : CRAAQ

Le microclimat d’une petite région est donc l’ensemble des conditions de vent, d’ensoleillement, de température et d’humidité qui influencent la santé et le rendement des productions agricoles. Il résulte du relief, de l’orientation des parcelles, de la présence des cours d’eau et plans d’eau, ainsi que des arbres isolés, en haies ou en boisés, qui caractérisent une zone géographique restreinte.

 

Qu’est-ce qu'un microclimat?

1.3 L’agroforesterie génère plusieurs effets bénéfiques pour
       le microclimat des régions agricoles

1.4 Des aménagements agroforestiers bien conçus interagissent avec le
      microclimat de façon favorable à l’agriculture

Les systèmes agroforestiers ont des effets complexes sur les différentes variables du microclimat. Selon les arbres choisis (essences,
hauteur à maturité, forme de la canopée, porosité de leur cime) et la façon dont ils sont plantés (denses ou dispersés, en ligne simple
ou en rangée multiple…), les modifications microclimatiques vont être différentes. On peut donc planifier et implanter des
aménagements agroforestiers permettant d’altérer favorablement le microclimat en fonction des résultats recherchés.

Les animations suivantes permettent de mettre en évidence les principales modifications microclimatiques générées par une haie brise-vent (HBV) et par un système agroforestier intraparcellaire (SAI).

1.1 Changements climatiques et agriculture

Différents modèles climatiques convergent pour prédire que le climat québécois devrait se réchauffer au cours des prochaines décennies. Dans le sud du Québec (au sud du 48e parallèle), on devrait ainsi observer une hausse des températures estivales de 1,9 à 3,0 °C en 2050, alors qu’on prédit que les températures en hiver devraient croître de 2,5 à 3,8 °C49. Les vagues de chaleur devraient également devenir plus fréquentes au cours des prochaines décennies : le nombre de jours où les températures dépassent les 30 °C est amené à augmenter, surtout dans le sud du Québec51.

 

Le contexte des changements climatiques contribuera à un réchauffement des températures au Québec.

L'impact des changements climatiques sur les vents est encore mal connu

 

L’impact des changements climatiques sur les vents a été relativement peu étudié à ce jour au Québec51 et plus de recherches doivent être conduites pour établir des prédictions fiables. Une des rares études publiées à ce sujet indique néanmoins qu’une hausse dans la fréquence des vents violents devrait survenir au Canada vers la fin du siècle18.

 

Des prédictions climatiques spécifiques à votre région sont disponibles sur le site d'Ouranos.

Un tel mode d’utilisation du territoire peut présenter différentes formes en fonction
notamment des composantes impliquées (association avec des cultures et/ou des
animaux) et des arrangements spatiaux des arbres au sein des systèmes de production.
En milieu tempéré, on retrouve ainsi deux grandes familles de systèmes agroforestiers :
les haies agroforestières et les systèmes agroforestiers intraparcellaires2.

Le lecteur qui voudra observer, voire étudier des systèmes agroforestiers implantés au Québec, pourra le faire en visitant le Réseau de sites de démonstration en agroforesterie. On retrouve une section dans la fiche dynamique où la structure et la composition de quelques exemples de sites bien implantés sont mentionnés (Annexe).

1.2 Agroforesterie : les arbres au service de  l’agriculture

 

Prédictions climatiques générales pour le Québec

Les précipitations annuelles seront globalement en hausse, mais avec des épisodes de sécheresse et de pluie intense en été, et moins de neige en hiver.

 

Les précipitations seront également affectées par les changements climatiques. Dans le sud du Québec, on prévoit une hausse des précipitations d’ici à 2050. Si la quantité de précipitations en été devait demeurer relativement inchangée49, la distribution de celles-ci pourrait devenir plus erratique, ce qui pourrait occasionner des épisodes de sécheresse. La saison propice aux orages devrait pour sa part être prolongée et on devrait noter une augmentation des événements de pluies intenses39. Les précipitations annuelles seront globalement en hausse, mais avec davantage d'épisodes de sécheresse et de pluie intense en été, et moins de neige en hiver.

Changements saisonniers de la température et des précipitations projetés pour le sud du Québec (sud du 48e parallèle), évalués à partir de simulations climatiques RCP 4.5

Crédit : Adaptation de Ouranos, 2015

Qu’est-ce que l’agroforesterie?

 

Impacts des changements climatiques sur le secteur agricole québécois

Les changements climatiques auront des impacts importants sur le secteur agricole québécois.

L’agroforesterie crée des systèmes agricoles plus diversifiés et donc plus résilients : en clair, nous avons besoin des arbres pour préparer dès maintenant les entreprises et les paysages aux changements climatiques.

« L’agroforesterie est un système intégré qui repose sur l’association intentionnelle d’arbres ou d’arbustes à des cultures ou à des élevages, et dont l’interaction permet de générer des bénéfices économiques, environnementaux et sociaux. »2

Le microclimat désigne un ensemble de conditions atmosphériques qui prévalent dans une zone géographique très restreinte et qui sont significativement distinctes du climat général dans lequel se situe cette zone.

  • ▼  Certaines cultures pourront être favorisées par la hausse des températures

     

    Il importe d’abord de mentionner que la modification de certains facteurs climatiques pourrait entraîner des impacts positifs pour les producteurs et productrices de la province. Ainsi, on prévoit que certaines cultures comme le maïs et le soya devraient être favorisées par la hausse des températures et l’allongement de la saison de culture et qu’il sera possible de cultiver ces cultures dans de nouvelles régions5, 9.

  • ▼  Toutefois, on anticipe plusieurs retombées négatives sur les cultures en général

     

    L’évolution d’autres facteurs climatiques devrait malheureusement entraîner des impacts négatifs sur les agroécosystèmes et porter ainsi atteinte à la durabilité et la rentabilité des entreprises agricoles québécoises. En ce qui concerne les productions végétales, la hausse des températures combinée aux précipitations estivales plus erratiques devrait augmenter la probabilité de stress hydrique en été, ce qui pourrait affecter la productivité des cultures43, 49. Les variations de température et d’humidité annoncées devraient également entraîner des modifications vis-à-vis de l’abondance, de la diversité et de la répartition des populations d’insectes ravageurs et d’agents pathogènes, entraînant possiblement des diminutions de rendement des cultures49.

  • ▼  L’augmentation des températures laisse aussi prévoir certains impacts pour les élevages

     

    Les vagues de chaleur pourraient accroître les taux de mortalité dans certains types d’élevage. À l’opposé, il se peut que la hausse des températures entraîne dans certains cas une augmentation du taux de survie des animaux élevés en plein air en hiver (en particulier les jeunes) et une diminution des coûts de chauffage. Les stress thermiques vécus par le bétail pourraient par ailleurs causer une perte de productivité (par exemple, une diminution de la production de lait et une réduction des gains de poids). Les rendements des plantes fourragères devraient pour leur part être affectés négativement par la diminution du couvert neigeux7 et il est possible que les céréales d’hiver soient également affectées par ce phénomène. La qualité nutritive de certaines graminées pourrait aussi décroître5. Finalement, dans certaines régions, une récolte de fourrages supplémentaire deviendrait possible, mais les plantes fourragères pourraient néanmoins être mises à mal suite à des épisodes de sécheresse ou d’inondations.

  • ▼  Enfin, les sols devraient subir les contrecoups des changements climatiques, qui augmenteraient

          entre autres les phénomènes d’érosion

     

    L’augmentation des épisodes de pluies intenses pourrait notamment entraîner un accroissement du ruissellement et une conséquente hausse du phénomène d’érosion hydrique. Sous des températures rehaussées, et avec des précipitations estivales erratiques, on peut s’attendre à une baisse du contenu en eau des sols durant l’été, ce qui pourrait conduire à une augmentation de l’érosion éolienne. Les pertes de sol générées par ces deux phénomènes auront évidemment des répercussions sur la productivité des cultures. L’augmentation de la température de l’air et des sols peut aussi contribuer à augmenter l’activité microbienne, la décomposition de la matière organique du sol et la minéralisation de l’azote. Or, si cette hausse attendue de la minéralisation de l’azote peut apporter de l’azote à court terme, elle pourrait aussi se traduire par une augmentation du lessivage de l’azote, en particulier sous forme de nitrates. Ces nitrates échappés peuvent à leur tour être transformés et émis dans l’atmosphère sous forme de protoxyde d’azote N2O (un puissant gaz à effet de serre). Ainsi, non seulement les pertes en azote pourraient affecter la rentabilité des entreprises agricoles, mais les émissions de N2O exacerberaient le phénomène de réchauffement climatique.