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agroforesterie et rendements agricoles

3.1 rendement des productions végétales

 

Les rendements risquent d'être plus instables dans les prochaines décennies

Au Québec, les changements climatiques devraient avoir des impacts variables sur le rendement des cultures. Certaines cultures comme le maïs et le soya, qui sont plus adaptées à des climats chauds, devraient être globalement favorisées et leur culture pourrait être envisagée dans de nouvelles régions du Québec. Les cultures plus adaptées aux climats plus frais comme le blé, l’orge et le canola devraient pour leur part maintenir des rendements globaux similaires5 ou légèrement inférieurs (dans le cas de l’orge)9 au cours des prochaines décennies. Si ces tendances sont généralement positives, il faut tout de même souligner que les modèles sur lesquels se basent de telles prédictions ne sont pas en mesure de prendre en compte la totalité des facteurs qui pourraient affecter les cultures, notamment parce qu’il est difficile de prévoir l’ampleur des extrêmes climatiques à venir et qu’on détient encore trop peu d’informations sur certains aspects (comme l’arrivée de nouveaux insectes ravageurs). Malgré la hausse générale de la productivité annoncée sur la base des températures, on peut dès lors s’attendre à ce que les rendements agricoles soient marqués par l’instabilité dans les prochaines décennies.

Site d'expérimentation d'un système agroforestier intercalaire situé à Baie-du-Febvre qui vise à étudier l'interaction entre les arbres et les cultures ainsi que de documenter les bénéfices environnementaux.

 

Crédit : CRAAQ

Au Québec, les changements climatiques auront probablement des impacts sur les élevages, sur la production laitière et sur la production de fourrages. Les animaux élevés en plein air devraient notamment être affectés par le stress thermique suite aux hausses des températures estivales et par le phénomène de refroidissement éolien lors des épisodes de froid intense accompagnés de vent en hiver. Ces deux phénomènes pourraient affecter négativement la productivité des troupeaux.

 

En outre, certaines plantes fourragères comme la luzerne pourraient être vulnérables au gel suite à la diminution prévue de la couverture de neige et la qualité nutritive de certaines graminées pourrait être réduite sous les conditions climatiques futures au Québec5.

Haie agroforestière implantée en bordure de pâturages dans la région de La Pocatière qui favorise le bien-être animal.

 

Crédit : CRAAQ

 

Des haies bien conçues et des arbres implantés dans les parcelles contribuent à limiter les effets négatifs du climat et favorisent la santé animale

La modification de microclimat entraînée par les systèmes agroforestiers pourrait minimiser de telles pertes de productivité. Des systèmes agroforestiers bien conçus pourraient par exemple réduire le stress animaux associé aux extrêmes de températures chez les animaux, diminuer l’énergie consacrée au maintien de leur température corporelle et augmenter le temps consacré au broutage. Les aménageme nts agroforestiers pourraient également réduire les taux de mortalité par hypothermie chez les animaux élevés en plein air (particulièrement pour les jeunes)4. Une méta-analyse58 rapporte finalement que dans des systèmes agroforestiers de différentes régions du monde où les arbres sont disséminés au travers des parcelles, le rendement des pâturages situés à l’ombre des arbres est sensiblement le même que celui des pâturages exposés au plein soleil. La qualité des plantes fourragères serait pour sa part généralement améliorée au sein des systèmes agroforestiers13.

 

Les effets bénéfiques des systèmes agroforestiers pourront contribuer à stabiliser les rendements

Plusieurs stratégies peuvent être envisagées au sein des entreprises agricoles pour mieux s’adapter à de telles fluctuations. Le potentiel d’amélioration du microclimat produit par les systèmes agroforestiers apparaît comme une avenue intéressante pour augmenter la stabilité des rendements sur la ferme et dans certains cas permettre une augmentation des rendements. De nombreuses études se sont penchées sur l’impact des systèmes agroforestiers sur le rendement des cultures à travers le monde. Des chercheurs ont notamment procédé à l’analyse d’un très grand nombre de données et d’études pour évaluer l’impact des haies brise-vent sur les rendements agricoles35, 48. Ces auteurs rapportent des augmentations de rendement pour une grande majorité de sites. Si beaucoup d’études font état d’une diminution significative du rendement dans la zone directement à proximité de la haie, cette perte est généralement compensée par des rendements légèrement supérieurs dans le reste de la zone protégée des vents par la haie14, 48, 59. En contexte québécois, l’effet des haies sur le rendement des cultures serait variable en fonction du site et des précipitations59. Une étude québécoise ayant évalué l’impact de haies brise-vent sur le rendement du maïs dans quatre sites de la province rapporte par exemple que les haies auraient un impact globalement neutre sur les rendements obtenus59. Les auteurs soulignent toutefois qu’aucune année sèche n’est survenue pendant leur étude, un point important sachant que l’effet des haies brise-vent serait généralement plus manifeste dans des contextes de pénuries en eau et qu’il est probable que de telles pénuries surviennent plus fréquemment dans le futur.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour ce qui est des effets des systèmes agroforestiers intraparcellaires sur le rendement des cultures en milieu tempéré, il importe tout d’abord de mentionner que la majorité des études sur le sujet a été réalisée dans des systèmes où les rangées d’arbres étaient peu espacées (8 à 15 m). Au sein de ces systèmes, dits de « première génération », on observe généralement des baisses de rendement à proximité des arbres (généralement sur une distance de 0,25 à 0,5 H, où H est la hauteur de l’arbre). Très peu d’études se sont intéressées à la performance des cultures dans les systèmes agroforestiers intraparcellaires de deuxième génération, qui présentent des densités d’arbres plus faibles et seraient ainsi mieux adaptés aux grandes cultures et plus acceptables pour les producteurs agricoles. Les quelques études qui se sont penchées sur le sujet rapportent des rendements qui sont en général satisfaisants et qui sont souvent équivalents à ceux mesurés dans des champs témoins dépourvus d’arbres15, 52. Une réduction de la densité d’arbres dans les parcelles permettrait donc de réduire la concurrence entre les arbres et les cultures, tout en optimisant les bénéfices occasionnés par la présence d’arbres. Ces pronostics de rendements en systèmes agroforestiers intraparcellaires de deuxième génération semblent donc davantage prometteurs que ceux obtenus dans ceux de première génération15, 52.

 

La santé et la productivité des animaux élevés en plein air, de même que les productions fourragères, seront affectées par les froids intenses et les chaleurs extrêmes

3.2 rendement des productions animales

Le microclimat généré par les systèmes agroforestiers pourrait également permettre de modérer l’effet des vents violents et des températures extrêmes, de protéger les sols face à l’érosion éolienne, de favoriser la pollinisation au sein de certaines cultures et de contribuer à la lutte contre les ravageurs, des éléments qui devraient tous apporter plus de stabilité dans les rendements agricoles.

Crédit : CRAAQ